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Intelligence et scolarité
Un Rubik’s Cube (Micosil/Flickr/CC)
Le livre « Les Enfants les plus intelligents du monde (et comment ils y parviennent ) » n’est pas, selon le New York Times, un énième bouquin dans la veine des masochistes « Pourquoi les Françaises ne grossissent pas » ou « Pourquoi les mères chinoises sont supérieures aux autres ».
Je ne l’ai pas lu. Sa recension publiée dans l’International Herald Tribune de ce week-end m’a tout de même semblé utile à partager. Car depuis quelques jours, on reçoit à Rue89 des courriels désespérés de futurs profs n’ayant toujours pas reçu leur affectation et n’ayant surtout jamais reçu de formation pour enseigner à des élèves.
Finlande, Corée du Sud et Pologne
Capture d’écran de l’article du New York Times
L’ouvrage a été écrit par une journaliste, Amanda Ripley, collaboratrice du Time magazine et du site The Atlantic.
Pour comprendre pourquoi les écoliers finlandais (champions d’Europe tout terrain), sud-coréens et polonais avaient les têtes mieux faites que celles des petits américains, selon les enquêtes internationales, elle s’est appuyée sur trois de ses concitoyens scolarisés dans ces pays.
Elle a aussi rencontré les responsables et les acteurs des différents systèmes éducatifs. Mais l’immersion par des « agents de terrain » pouvant comparer deux formes d’enseignement est sans doute le côté le plus intéressant de son travail. On oublie toujours de demander aux premiers concernés ce qu’ils en pensent.
1 Kim en FinlandeKime est une adolescente « agitée » de 15 ans, originaire d’un coin rural de l’Oklahoma. De la Finlande, elle ne connaissait que les « châteaux de neige ». Elle découvre le vrai pays de Ari Vatanen dans une petite ville, Pietarsaari, et une école sans iPad ni tableau électronique interactif aux murs. Plutôt des rangées de bureaux et un tableau à la craie, mais « des enseignants brillants, talentueux, extrêmement bien formés et qui aiment leur métier ».
Plutôt que de s’appuyer sur un système complexe de performances, d’évaluations et d’analyses des données, « comme nous le faisons », explique l’auteure, « la Finlande sélectionne ses meilleurs étudiants pour les former à l’enseignement, créant ainsi un cercle vertueux : mieux préparés, mieux formés, ces enseignants jouissent d’une grande autonomie et ils sont heureux ».
Sentant bien que l’ambiance dans son école finlandaise n’avait rien à voir avec ce qu’elle avait connu, Kim s’est risquée un jour à demander à ses camarades pourquoi ils s’investissaient autant dans leur scolarité :
« Ben, c’est l’école, quoi. Comment tu veux faire autrement pour avoir ton diplôme, aller à la fac et avoir un bon boulot ? »
2 Eric en Corée du SudEric, qui vient du Minessota où il était scolarisé dans une excellente école privée, a été extrêmement choqué de voir ses voisins de classe apporter leur oreiller et piquer des petites siestes en cours. Puis il a compris pourquoi ils étaient si fatigués : ils avaient passé la nuit à étudier dans les « hagwons », ces cours privés où les enfants coréens « apprennent réellement ».
En Corée du Sud, la pression académique est totalement hors contrôle, explique Amnada Ripley, et les familles se saignent pour que leurs enfants puissent intégrer les universités ultra-sélectives, censées leur ouvrir une vie prospère.
Les écoliers se retrouvent prisonniers de « la roue du hamster » qui, selon elle, crée autant de problèmes qu’elle apporte de bienfaits. Mais à choisir, elle préfère encore ce système à celui américain, qu’elle compare à un trampoline gonflable, ludique, chatoyant :
« C’est excessif et implacable, mais plus honnête. Dans les pays “roues à hamster”, les enfants savent ce que cela implique de jongler avec des idées complexes et de penser hors de leur zone de confort. Ils comprennent la valeur de la persévérance, ils savent ce que c’est d’échouer. »
3 Tom en PologneComme en Finlande et en Corée du Sud, les enseignants polonais seraient excellents, mais pour Tom, un ado cultivé originaire de Pennsylvanie et lycéen à Wroclaw, la principale différence entre les deux systèmes, c’est... le sport.
Dans sa ville natale, le sport était au cœur de l’institution. A Wroclaw, il n’y a pas de sport dans l’emploi du temps du lycée. « Et pourquoi en serait-il autrement ? », approuve la journaliste. « Il n’y a pas de tromperie sur ce que doit être l’école, ce qui compte réellement pour l’avenir des enfants. »
La France, pays où les élèves sont le plus stressés
Il s’agit donc d’un regard américain, de comparaison avec l’éducation aux Etats-Unis. Le même exercice est aisément transposable.
Selon le programme Pisa (qui compare les performances de différents systèmes éducatifs en évaluant les compétences acquises par les élèves en fin d’obligation scolaire (15 ans), la France arrive à la 22e place en mathématiques (les Etats-Unis à la 30e), 27e en sciences (les Etats-Unis à la 23e) et 22e en lecture (les Etats-Unis à la 17e).
Au-delà de ce classement, qui n’est pas parfait, la partie réservée à la France note que ce pays consacre à l’éducation un montant moyen, comparable à ceux de pays proches économiquement. Il est surtout « le pays où les élèves sont “ les plus stressés ”, et se sentent peu soutenus par leurs enseignants. »
Heureusement, lors de son discours de clôture de l’Université d’été du parti socialiste à la Rochelle, le premier ministre a promis que « Les professeurs auront des moyens supplémentaires mais en même temps la belle mission de réussir l’éducation de la jeunesse française. »
Tags : pays, sud, enfants, finlande, systeme
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